Essai DS9 (2022) – Aux Champs-Elysées

Le luxe à la française

Connaissez-vous le syndrome de la voiture de luxe française ? On a beau se buter avec des technologies avant-gardistes joliment emballées dans un paquet des plus avenants, le résultat reste le même. Rien n’y fait. Sur la douloureuse question du luxe automobile, on botte constamment en touche face aux allemandes. L’histoire se répète-t-elle avec cette inédite DS9 fraîchement débarquée de…Chine ? 

Le cuir en embuscade

« Alors, c’est pas la classe ça ? ». Tel un agent commercial rompu à la négociation, le monsieur livrant les véhicules du parc presse m’annonce la couleur avant même d’avoir mis un pied à bord. Mais il ne m’aura pas menti. En découvrant l’objet que l’on me confiera pour la semaine, ma rétine se trouve inévitablement attirée par les chromes ici et là, doublés de la teinte Cristal Pearl proche du blanc de Troyes. Classe était bien le mot. On en viendrait alors à oublier les clins d’œil pourtant manifestes adressés à la DS19 : la bande chromée occupant le capot, le jonc courant sous les optiques arrière et l’éclairage sur le montant C sont autant d’éléments usités par sa majesté. Les feux, eux, intègrent des modules aux accents violets pivotant au déverrouillage du véhicule tandis que les poignées érectiles se déploient à mon approche. C’est une façon comme une autre de saluer votre humble serviteur.

Tant pis pour la discrétion, ce sera une autre fois. Et puisqu’on y est, l’habitacle cogne pareillement : du cuir nappa rouge recouvre les sièges, les panneaux de porte, le volant et la planche de bord, doublé de surpiqûres. Je n’aurai pas osé, d’autant plus que ces friandises sont l’apanage de l’intérieur Opéra Rouge Rubis facturé 5 250 €. Quant au ciel de toit, il est généreusement garni d’Alcantara noir. Tout est soyeux et on se laisse délibérément prendre au jeu. Chapeau.

« La qualité de la finition est véritablement bluffante et prouve une nouvelle fois le savoir-faire de DS Automobiles en la matière »

C’est uniquement lorsque l’on pousse le « braconnage » vers les parties basses que l’on sent une pointe de déception. La présence de plastiques durs calme mes ardeurs et devient difficile à oublier à ce niveau de gamme. Pour le reste, c’est un sans-faute même si l’on frôle l’overdose d’effets spéciaux par endroits. A l’arrière, l’ambiance est royale, dans tous les sens du terme. L’ambiance Opéra susmentionnée donne en effet droit à un accoudoir central moelleux accompagné d’appuie-tête lounge. Idéal pour roupiller après avoir – gentiment – donné à Nestor la direction à suivre. 

Et bien que les quatre sièges soient chauffants, massants et ventilés, j’ai rapidement repéré la meilleure place grâce à un point de détail : un petit bouton permettant d’avancer le siège du passager avant. Par simple logique, on déduit alors que le fauteuil convoité par tous est à l’arrière droit du véhicule. A ce stade-là, on en veut plus, toujours plus ! Du coup, en zieutant en profondeur l’arrière, je tombe sur un os. Il n’y a pas d’écran au dos des sièges avant ! Prévoyez donc un iPad et un câble USB A (oui, à l’ancienne encore) pour les voyages d’affaires… 

« L’ergonomie n’est pas le fort de la DS9. Les doigts glissent par mégarde sur le mauvais bouton et activent une fonction que vous n’avez pas demandée. Frustrant ! »

D’ailleurs, puisqu’on en est là, côté connectivité et infodivertissement, la DS9 accuse malheureusement un énorme retard. Les menus ne sont pas intuitifs, la réactivité inexistante et les graphismes d’un autre âge. Et ce ne sont pas les raccourcis sous forme de touches tactiles qui sauveront le tableau. Ils sont bien trop petits et n’offrent aucun feedback (ni haptique, ni sonore). De plus, ils disparaissent contact coupé. On doit donc apprendre par cœur les fonctions associées à chaque bouton, un comble ! Plus aberrant encore, les commandes de ventilation passent obligatoirement par l’écran et deviennent invisibles sous un très fort soleil. Après tout, jouer au cache-cache avec les fonctions, c’est ludique et ça permettra à Nestor de patienter en attendant le propriétaire…

De l’importance de la zénitude

Instant spectacle au contact : la montre signée BRM pivote au sommet du tableau de bord. Après une semaine d’utilisation, cela fait toujours son petit effet. Premiers tours de roue. En tant qu’habitué de voitures compactes, je n’ai pas ressenti une quelconque lourdeur au volant de la DS9. Il faut dire que le profil élancé et la relative légèreté (1 839 kg en E-Tense 250) de la grande DS ont de quoi brouiller les pistes. Je ne vais pas non plus vous dire qu’elle se conduit comme une citadine. Si le rayon de braquage est bon, il faut veiller au gabarit en ville, surtout que les 4,93 m de l’auto la rendent un brin gauche lorsque l’on est en quête d’une place de parking. C’est alors le moment idéal pour brandir la botte secrète avec le Park Assist. Direction, accélérateur, frein, changement de vitesse, la DS9 s’occupe de tout.

Verdict ? Efficace et terrifiant. L’auto se rapproche dangereusement d’un autre véhicule. Les radars s’émoustillent et la caméra de recul – de piètre qualité au passage – signale une collision imminente. Tel un moniteur d’auto-école intervenant farouchement sur les commandes, la DS freine fort au dernier moment. Ouf ! La nuit ? Le système de vision nocturne remplit pleinement son office mais se montre trop sensible en ville et bipe en permanence à la vue du moindre piéton. Et de toute manière, les feux éclairent déjà bien même s’ils ne bénéficient pas de la technologie matricielle. L’affichage tête haute est aussi aux abonnés absents, trahissant alors l’intime filiation entre la DS9 et la Peugeot 508. La Citroën C5 X, elle, y a droit, alors qu’elle joue dans le segment inférieur. Dommage… 

Voyageuse patentée ?

Dire que la DS9 n’est pas née pour abattre les kilomètres serait vous mentir. La conduite semi-autonome ? Au point. L’insonorisation ? Bonne grâce au vitrage feuilleté. Les sièges ? Moelleux sans conteste. Le DS Active Scan Suspension ? Du marketing ! L’auto avale bien les bosses et la sensation de flotter sur autoroute est réelle, mais cela ne surpasse pas un système d’amortissement traditionnel parfaitement calibré. A côté de cela, les performances se montrent convenables bien que le moteur soit trop présent dans l’habitacle en mode Sport, accélérateur enfoncé à fond. La boîte EAT8 envoie alors de vilains à-coups. Aussi, son réservoir assez petit (42 l) limite son rayon d’action et force à ravitailler souvent. C’est d’autant plus vrai que la voiture peut se mettre à boire sans soif si l’on adopte une conduite un tant soit peu nerveuse, chose que personne ne fera, évidemment.  

« Avec quelques techniques d’éco-conduite, je suis parvenu à abattre 64 bornes sans user de la moindre goutte de sans-plomb »

Car ce qui étonne vraiment, c’est la douceur de roulage en mode électrique où la DS9 apparaît excessivement docile. On n’a aucunement envie d’attaquer. On préfère rouler aussi longtemps que possible en électrique quitte à naviguer en deçà des limitations de vitesse. Cela a d’ailleurs réveillé le majordome qui sommeillait en moi. Exagération ? Pas du tout ! Et on pourrait même donner des leçons de bon sens à l’exécutif. On devrait rendre l’achat d’une DS9 obligatoire pour réduire la mortalité routière et arrêter de planter des radars à tout-va. Je dis ça, je dis rien…

Raisonnablement chère mon cher !

Je ne vois pas l’intérêt d’acheter une voiture de luxe d’entrée de gamme. Outre la bizarrerie sémantique, vous aurez surtout l’impression de payer au prix fort un produit qui n’est pas fini. La DS9 débute à 48 700 € en Performance Line + avec un moteur essence de 225 ch. Pas mal, mais autant aller jusqu’au bout quand on baigne dans l’automobile haut de gamme. Passons ainsi directement au niveau Rivoli + avec la motorisation hybride rechargeable de 250 ch. Ajoutons quelques options sympathiques pour arriver à 73 350 €, soit le prix exact de notre modèle d’essai à l’euro près. Cher, vous avez dit ? Après avoir sorti ma calculette – car je ne suis pas bon en maths – le constat est à relativiser. Déjà parce que la version 360 ch pareillement équipée dépassera allègrement les 80 000 €. Ensuite parce que la concurrence allemande n’est pas aussi bien dotée à prix équivalent. Les teutonnes vous tendent donc les bras, à condition de signer un chèque à six chiffres. Vous aurez alors un blason plus prestigieux au bout du capot. Mais peu importe où se portera votre choix, faites-le à ma place. Je le répète une deuxième fois, je préfère les petites voitures, bien que cette DS9 demeure un bon cru, original qui plus est.

On aime

  • Finition léchée
  • Confort satisfaisant
  • Prix bien placés (si, si…)
  • Équipement fourni…

On regrette

  • …malgré quelques lacunes
  • Infodivertissement à la peine
  • Ergonomie à revoir
  • Notoriété à parfaire

Verdict : 14,8/20 – Bien

Un grand merci à DS Automobiles pour le prêt du véhicule sans quoi cet essai n’aurait pas été possible.

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